Innovation pédagogique et technologie immersive : un vecteur de développement cognitif des enseignants-chercheurs. Proposition méthodologique d’analyse de l’activité

Ludovia 2018

Auteurs : Marie-Laure Weber, Florence Rodhain et Antoine Chollet
Ludovia | Ax-les-Thermes (France) | 21-24 août 2018

Résumé

L’innovation pédagogique est au cœur des questions que se posent les institutions d’enseignement supérieur et des programmes de soutien émanent des universités pour accompagner la transformation pédagogique dans une visée d’excellence[1]. De plus, le Ministère de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, incite à la promotion de nouvelles technologies numériques dans son volet « Stratégie numérique pour l’enseignement supérieur ».[2] Dans ce double contexte : innovation pédagogique et stratégie numérique, les acteurs de la formation (enseignants-chercheur et étudiants) sont au premier plan des mutations de l’enseignement supérieur.

Les différentes recherches sur les outils numériques dans l’enseignement supérieur tels que les Massive Open Online Course (MOOC), les Serious Games, l’e-learning  abordent des questions concernant l’adoption, l’usage, l’apprentissage, la création de valeur, la performance etc. (Alvarez, 2014; Bakki et al., 2015; Coppola et al., 2002; Djaouti, 2016; Houzé & Meissonier, 2016, 2016; Allal-Cherif & Lombardo, 2017). Aujourd’hui, la réalité virtuelle arrive dans l’enseignement comme nouvel outil pédagogique (pour exemple : SimForHealth[3]). De ce fait, l’ensemble des questions qui ont pu se poser pour ces précédentes technologies, sont d’actualité pour la réalité virtuelle. Dans le cadre de l’appropriation, la littérature est dense et s’analyse sous l’angle des acteurs comme processus psychologique de recherche de sens (Gaskin & Lyytinen, 2012) et processus d’incorporation dans leur pratique de travail (De Vaujany, 2009).

Par ailleurs, au regard des approches de l’analyse de l’activité, la transformation de celle-ci est vecteur de développement cognitif et de métamorphose de compétences, pour l’acteur qui décombine et recombine des schèmes existants (Pastré, 2005; Pastré, 2011), qui adapte son expérience (Gaudart & Ledoux, 2013). L’appropriation est alors un moyen de se dépasser (Clot, 2008; Bobillier Chaumon, 2016). En outre, la compétence est une notion délicate à définir, terme polysémique, elle comprend autant de définitions que de cadres théoriques. Ainsi, Vergnaud (1999) n’entend pas la définir mais la considérer comme un concept pragmatique qui ne se comprend pas uniquement dans le résultat de l’action mais dans l’analyse de son organisation. Astier (2008, p. 66) précise que «si l’on pose que l’activité est une mobilisation subjective pour faire face à un but poursuivi dans des conditions déterminées, toujours pour parties inédites pour le sujet qui s’y confronte, alors on peut appréhender la compétence comme une caractéristique subjective ». C’est une présomption de compétence qui rend compte de l’intelligibilité de l’action du sujet (Petit, 2007).

C’est dans ce contexte et cadre théorique que nous nous interrogeons. Comment peut-on étudier le développement de compétence doublement induit par l’intention d’appropriation d’une technologie numérique nouvelle et par l’innovation pédagogique liée ?

Notre communication a pour objectif de proposer une méthodologie permettant d’étudier la subjectivité de la compétence au travers de l’analyse de l’activité des enseignants-chercheurs et de leur intention d’innovation pédagogique et technologique. Nous appuyons notre recherche sur une méthode mixte couplant une expérimentation de la réalité virtuelle et la mise en œuvre de la
Q-method issue des travaux du psychologue William Stephenson (1902-1989) et repris par (Gauzente, 2005, 2013).

Ainsi nous souhaitons apporter un premier éclairage théorique et méthodologique qui entoure la relation innovation/institution et plus précisément une relation vectrice de développement : acteur de l’innovation/activité dans l’institution dans une perspective d’environnement capacitant (Falzon, 2013).

[1] « Programme de soutien à l’innovation pédagogique », consulté le 9 mars 2018 sur : http://muse.edu.umontpellier.fr/app/take-off-programme-de-soutien-a-linnovation-pedagogique/

[2] « Stratégie numérique pour l’enseignement supérieur », consulté le 9 mars 2018 sur : http://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/pid30098/strategie-numerique-pour-l-enseignement-superieur.html.

[3] Simforhealth.fr (2017, 2018), « SimforHealth reconnu parmi les 4 innovations e-santé au CES® 2017 ! », consulté le 9 mars 2018 sur http://simforhealth.fr/actualites/simforhealth-retenu-parmi-les-4-innovations-e-sante-au-ces-2017/

Références

Allal-Cherif, O., & Lombardo, E. (2017). Conception, optimisation, cognition, émotion et  socialisation : quelle valeur créent réellement les serious games ? Actes du 22ème Colloque AIM : Association Information et Management, 17-19 mai, Paris.

Alvarez, J. (2014). Serious Game: questions et réflexions autour de son appropriation dans un contexte d’enseignement. Psychologie clinique, vol. 1, pp. 112‑126.

Astier, P. (2008). La professionnalisation comme intention, comme processus et comme légitimation. Savoirs, vol. 17, pp. 63‑69.

Bakki, A., Oubahssi, L., Cherkaoui, C., George, S., & Mammass, D. (2015). MOOC: Assister les enseignants dans l’intégration des ressorts de motivation dans les scénarios pédagogiques. Actes de la 7ème Conférence sur les Environnements Informatiques pour l’Apprentissage Humain (EIAH), 2-5 juin, Agadir, Maroc.

Bobillier Chaumon, M.-E. (2016). L’acceptation située des technologies dans et par l’activité : premiers étayages pour une clinique de l’usage. Psychologie du Travail et des Organisations, vol. 22, n°1, pp. 4‑21.

Clot, Y. (2008). Travail et pouvoir d’agir, Paris, Presses Universitaires de France.

Coppola, N., & Starr Roxanne Hiltz, N. (2002). Becoming a virtual professor: Pedagogical roles and asynchronous learning networks. Journal of Management Information Systems, vol. 18, n°4, pp. 169‑189.

De Vaujany, F.-X. (2009). Les grandes approches théoriques du système d’information. Systèmes d’Information & Management, vol. 14, n°4, pp. 109-110.

Djaouti, D. (2016). Serious Games pour l’éducation: utiliser, créer, faire créer? Tréma, vol. 44, pp. 51‑64.

Falzon, P. (2013). Pour une ergonomie constructive. Presses Universitaires de France.

Gaskin, J., & Lyytinen, K. (2012). Psychological ownership and the individual appropriation of technology. Information Systems Theory, Springer, pp. 25-39.

Gaudart, C., & Ledoux, É. (2013). Parcours de travail et développement. Ergonomie constructive, Presses Universitaires de France, pp. 117-130.

Gauzente, C. (2005). La méthodologie Q et l’étude de la subjectivité. Chapitre 7 : Management des ressources humaines, Méthodes de recherche en sciences humaines et sociales. Méthodes & Recherches, pp. 177‑206.

Gauzente, C. (2013). Une invitation illustrée à utiliser la Q-method dans les Recherches en Systèmes d’Information. Systèmes d’Information & Management, vol. 18, n°2, pp. 69‑109.

Houzé, E., & Meissonier, R. (2016). Performance du E-Learning: de l’amélioration des résultats de l’apprenant à la prise en compte des enjeux institutionnels. Systèmes d’Information et Management, vol. 10, n°4, pp. 87-113.

Pastré, P. (2005). Dynamique et métamorphose des compétences professionnelles. Psychologie du travail et des organisations, vol. 11, n°2, pp. 73‑87.

Pastré, P. (2011). La didactique professionnelle. Education Sciences & Society, vol. 2, n°1, pp. 145-198.

Petit, L. (2007). Activité, expérience et présomption de compétences. Actes du Congrès International Actualité de la Recherche en Education et en Formation (AREF), 29 août-1er septembre, Strasbourg, France.

Vergnaud, G. (1999). Le développement cognitif de l’adulte. Traité des sciences et des techniques de la formation. Paris: Dunod, pp. 189‑203.

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